MOINS Jacques (1929 - 2011)
par José Gotovitch
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Jacques Gaston Moins est né à Etterbeek le 3 octobre 1929 dans une famille résolument laïque et antifasciste, d’un père initialement porteur de télégrammes devenu employé à l’Union des Villes, et d’une mère couturière. L’atmosphère de l’Athénée d’Ixelles où il entame ses humanités est nettement hostile à l’Ordre Nouveau et constitue un foyer de résistance. Jacques Moins se passionne pour l’histoire et la littérature et se prend d’une admiration qui ne le quittera jamais pour Anatole France. A la fin de sa vie encore, ses mémoires seront jalonnées de citations très politiques du grand écrivain.
En 1947, il adhère au PSB et tout naturellement, à l’ULB où il entame les études de droit, aux Etudiants socialistes. Il y fait ses classes de marxisme et d’esprit critique car une équipe brillante, autour de Robert Devleeshauwer, décortique le suivisme atlantique des dirigeants socialistes sous la férule de Paul-Henri Spaak. Ce groupe se retrouve à l’Ecole ouvrière supérieure mais aussi autour de la tendance de gauche animée par Isabelle Blume.
Le durcissement de la guerre froide, notamment la prise de pouvoir communiste à Prague, crée un choc décisif : avec quelques autres, dont Louis Van Geyt, il demande son admission aux Etudiants communiste où Willy Peers lui remet sa carte. Entrer dans le monde communiste à ce moment c’est, comme il le dira plus tard, comme entrer en religion, avec une foi absolue, détentrice de la seule vérité, avec pour conséquence l’enfermement dans un camp retranché. Mais la part de romantisme, de foi en l’avènement inéluctable, d’une société égalitaire agit comme aliment au bonheur messianique qu’éprouvent les militants. Moins assume très rapidement des responsabilités au sein du Cercle mais aussi dans les cercles universitaires où les communistes manœuvrent avec efficacité pour détenir une part relativement importante du « pouvoir ». Evénements nationaux - dont la question royale - et internationaux ont une profonde résonance dans le monde étudiant politisé, et le secrétaire d’organisation des EC en fait son écolage politique.
Militant de la section d’Ixelles, il intervient longuement dans la discussion préparatoire au Congrès de Vilvorde de 1954 rejoignant les critiques générales envers le manque de démocratie interne, l’indifférence de la direction face aux suggestions de la base. Mais il interpelle aussi sur l’abandon tacite du mot d’ordre d’Etat fédéral sans aucune discussion à cet égard, sur le manque de vigilance envers la puissance et l’action réactionnaires de l’Eglise de Belgique. Il s’affirme peu à peu comme un militant écouté dans la Fédération bruxelloise. Par ailleurs, plus discrètement, il prête ses compétences juridiques aux parlementaires.