Histoires du PCB, le CArCoB a lu pour vous...

Histoires du PCB

Si le PCB ne constitue pas en Belgique un sujet fréquemment traité par les historiens, son histoire se construit néanmoins progressivement, et souvent au détour d’ouvrages qui n’ont pas cet objectif comme but premier. Nous voudrions très brièvement signaler dans cette rubrique les apports d’ouvrages dont le titre n’indiquerait pas à première vue qu’ils contiennent des pages originales et novatrices sur l’histoire du communisme en Belgique. Une première moisson, dont nous excluons, car il en a été largement fait écho ailleurs, le livre à succès de Jean Lemaitre, « C’est un joli nom, camarade. Jean Fonteyne, avocat de l’Internationale communiste », Editions Aden, Bruxelles, 2012, ainsi que notre propre travail, José Gotovitch, « Du communisme et des communistes en Belgique. Approches critiques », Aden, Bruxelles, 2012. Ces ouvrages sont évidemment consultables dans notre bibliothèque.

José Gotovitch


Les années de la libération, le PCB et ses ministres


Conway Martin, The Sorrows of Belgium Liberation an political reconstruction, 1944-1947, Oxford University Press, 2012, 415 p.
Cet exceptionnel ouvrage sur la période de la libération de la Belgique, basé sur les archives les plus récemment ouvertes à la recherche, inscrit les années 44-47 dans une vision sociale et politique globale, déchiffrée à la lumière d’une con-naissance profonde de l’espace européen et particulièrement de la Grande Bretagne, acteur essentiel du moment. Cette période est celle de la plus grande influence politique du PCB, notamment au travers de ses participations gouvernementales, que les archives du Premier Ministre Van Acker et de la Sûreté décrivent de l’extérieur et que Conway combine avec une compréhension fine des archives du
PC et des dépouillements exhaustifs des journaux.
Un texte désormais imparable et pour l’histoire du PC et celle de la Belgique d’après guerre. Nous pouvons annoncer avec plaisir qu’avec un peu de patience, nous disposerons d’une traduction française.

 
Cultures


Eva Schandevyl, Tussen revolutie en conformisme. Het engagement en de netwerken va linkse intellectuelen in België, 1918-1956, Academic & scientific publishers, VUB press, Bruxelles, 408p.
Issu d’une thèse de doctorat à la VUB, cet ouvrage sur la gauche intellectuelle belge consacre les 3/4 de ses pages aux communistes. Insérée dans une vision théorique qui relève très naturellement de Bourdieu, l’auteur a pris la question à ses racines (la révolution bolchévique) et réussit à mener son enquête à travers
toutes les époques, de 1918 à 1956. Travail basé sur les archives du PCB, mais bien au-delà, il constitue une somme absolue qui permet également de situer les communistes et leurs compagnons de route dans la toile globale du statut des intellectuels en Belgique.

 

Laurence van Nuijs, La critique littéraire communiste en Belgique. Le Drapeau Rouge et De Roode Vaan (1944-1956), Peter Lang, Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2012, 332 p.
Le PCB « mordit » largement dans le monde culturel de l’après seconde guerre et cela se concrétisa doublement : sa presse ouvrit largement ses colonnes aux questions culturelles principalement littérature et peinture ; des plumes d’une notoriété effective assurèrent à ses pages culturelles des chroniques critiques de haut vol. L’auteur a analysé les deux organes nationaux du parti en évaluant en quantité, qualité, thèmes, genres, évolutions, la critique littéraire dispensée pendant les onze années sous revue. Elle en biographie les auteurs, bien souvent nous les révèle, recense les ouvrages pris en compte, étudie les modes successives et les codes. Particulièrement bienvenue pour le lecteur francophone, son étude sur l’étonnante richesse des contributions dan la Roode Vaan.

 

Geneviève Michel, Paul Nougé. La poésie au cœur de la révolution, P.I.E. Peter Lang, 2011, 420 p.
Paul Nougé (1885 - 1967) fut l’un des piliers du groupe des surréalistes belges. Il se décrivit comme communiste depuis la révolution d’Octobre mais ses relations avec le Parti communiste connurent des évolutions qui vont de la fondation du parti à la mort de Staline. Cet ouvrage (et plus spécifiquement les pages 1 à 75) décrit minutieusement les rapports du groupe de Bruxelles avec le PCB, particulièrement dans l’après guerre et éclaire le rapport du PCB à l’art et aux artistes à ces périodes.

 
Femmes communistes


Deux ouvrages éclairent l’intervention du PC dans la problématique de la lutte pour l’émancipation des femmes et le rôle joué par les militantes communistes au sein des organisations créées sous l’égide du PCB à ces fins : la Ligue des Femmes contre la guerre et l’impérialisme, le Comité mondial des Femmes pour la Paix, le Rassemblement des Femmes pour la Paix, la Fédération démocratique des Femmes. L’ouvrage de France Huart et Sophie Pereira dresse systématiquement le portrait de ces militantes d’avant et d’après guerre, celui de Catherine Jacques insère leur combat dans la mouvance générale des luttes pour l’égalité.

Catherine Jacques, Les féministes belges et les luttes pour l’égalité politique et économique (1918-1968, Académie Royale de Belgique, Classes des Lettres et des Sciences morales et politiques, Bruxelles, 2013, 282 p.

France Huart et Sophie Pereira, Rassemblement des Femmes pour la Paix. 1949-2009. Un mouvement, une histoire, des engagements, Université des Femmes, Bruxelles, 2009, 328 p.

 
Mémoires


Henri Lederhandler, Un parcours improbable, mise en récit par Serge Pairoux, Editions Luc Pire, Liège, 2013, 222p.
Les mémoires sont suffisamment rares pour ne pas saluer avec plaisir l’ouvrage livré par Henri Lederhandler qui nous entraîne dans un parcours inscrit profondément dans le demi siècle communiste. Enfant juif grandi dans les Marolles, enfant caché puis orphelin, Henri Lederhandler raconte sobrement la saga qui fit de lui après guerre un jeune communiste, animateur et très vite dirigeant de la Jeunesse communiste. C’est un témoignage sans acrimonie d’un arrachement qui le conduit vers le "grippisme" et un attachement à la Chine populaire qui va déterminer son destin (à vrai dire fort heureux) professionnel. A cela s’ajoute bientôt une adhésion aux causes juives qui en fait un sponsor du CCLJ. Un itinéraire déroulé avec la plus grande sincérité qui constitue dès lors un très intéressant et instructif outil d’analyse politique psychosociologique.

 

 

Biographies de communistes

 

Avec les dossiers de la Commission de Contrôle Politique du PCB (CCP), le CArCoB possède une banque de données exceptionnelle sur le personnel militant communiste en Belgique, base unique pour l’étude prosopographique, sociologique ou anthropologique. De nombreux chercheurs y font constamment appel car le CArCoB pratique une politique de large ouverture.
Mais il s’agit de documents bruts à mettre en forme et à contextualiser.
C’est l’objectif de plusieurs dictionnaires qui ont vu le jour et poursuivent leur élaboration.

Le regretté Milou Rikir a établi l’ensemble des notices biographiques des élus communistes depuis les origines du PCB, dont l’envergure dépasse largement les acquis du fameux Van Molle. Il a poursuivi en réunissant les données relatives à des ensembles provinciaux et communaux. Ces outils, résultats de dépouillements minutieux de la presse et des archives seront prochainement disponibles sur le site du CArCoB.

A paru par ailleurs dans le cadre des Dictionnaires biographiques du mouvement ouvrier, appelé communément le Maitron, un volume consacré aux militants francophones de l’Internationale communiste qui englobe une centaine de militants belges. Publié en 1992, ce dictionnaire a connu une édition élargie disponible aujourd’hui sur le site du Maitron accessible à tous les chercheurs sur demande motivée.
http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/
José Gotovitch et Claude Pennetier (dir.), Dictionnaire biographique des Kominterniens. Belgique, France, Luxembourg, Suisse, (deuxième collection) Collection Maitron, Editions de l’Atelier, Paris, 2010, CD Rom.

Mais la grande nouvelle de ces derniers mois est la résurrection près de vingt ans après le premier et seul volume paru du Dictionnaire du mouvement ouvrier en Belgique (lettre A et B). Avec l’appui du CARHOP, une équipe nouvelle, réunissant anciens et nouveaux chroniqueurs a relancé l’entreprise dont les premiers fruits sont déjà accessibles par le truchement et l’amabilité de l’équipe du Maitron qui héberge ce dictionnaire belge sur son site. La lettre fatidique B est dépassée et près de 1000 notices sont déjà disponibles. Le CArCoB en est partie permanente et se charge tout particulièrement des notices relatives aux militants communistes.

Un travail gigantesque est donc relancé et toutes les bonnes volontés sont acceptées avec joie, sous la direction d’un comité éditorial largement pluraliste et exclusivement scientifique.

José Gotovitch

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